Sujet d’inquiétude par excellence, le choix des logiciels et les problèmes
d’interopérabilité ont été au coeur de la table-ronde du 19 mai, qui a réuni à distance
maître d’ouvrage, bureau d’études et éditeurs de logiciels.
REXInteropérabilitéZoomTable ronde
L’interopérabilité, frein ou vecteur d’un BIM efficient ?
Interopérabilité : quelle(s) solution(s) techniques ?
Si Toulouse Métropole, engagée dans le BIM depuis 2014-2015, veille à entraîner avec elle tous les acteurs du secteur, restent des obstacles à surmonter. Parmi lesquels les problèmes d’interopérabilité et de dynamique humaine. Format IFC versus formats natifs, tel est l’éternel débat qui agite les tables rondes du REX BIM Tour ! Que fautil choisir aujourd’hui pour s’épargner les problèmes d’interopérabilité tant décriés ? « Le format IFC est devenu incontournable pour les gros projets », a jugé Guillaume Guillaume Vray, Directeur France de All Plan. Pour plusieurs raisons. Dans des projets qui comportent une problématique de gestion de patrimoine, la maquette IFC permet de se projeter dans le futur. En outre, dans un secteur comme le bâtiment où chaque corps de métier travaille en silo, avec son propre logiciel, le format IFC est indispensable pour que tout le monde se comprenne. « C’est un moyen de collaborer sans avoir à refaire plusieurs fois des tâches et des actions, a insisté le responsable d’All Plan. C’est un moyen de gagner en productivité et de ne pas perdre de temps en devant repartir d’un plan 2D pour reconstruire quelque chose. » Il n’y aurait donc pas matière à débat... Et pourtant, « quand on parle de problèmes d’interopérabilité, le seul recours au format IFC ne suffit pas », a tempéré Emmanuel Di Giacomo, Responsable Europe du développement des écosystèmes BIM chez Autodesk. Chaque professionnel doit aussi anticiper le choix de son logiciel, en fonction de ses besoins. Et prendre la mesure des enjeux d’organisation et de management.
Un problème à dimension humaine
« L’interopérabilité, c’est surtout un problème de méthodologie, a souligné Emmanuel Di Giacomo. Il faut avant tout se pencher sur l’organisation des méthodes de production, pour fluidifier les échanges entre les professionnels qui travaillent ensemble. » « Collaborer, c’est anticiper le fait que d’autres vont utiliser mes données et que j’aurai besoin de celles des autres, a martelé de son côté Julien Mercier. Chacun doit s’interroger sur les données dont il va avoir besoin et sur celles dont les autres auront besoin. Il faut avoir conscience qu’on ne produit plus de la donnée que pour soi-même. » Cela exige par conséquent d’identifier les données et les formats qui seront nécessaires, mais aussi la façon dont les parties prenantes vont structurer l’information. « Pour que les acteurs puissent échanger, ce n’est pas qu’une question de logiciel, mais aussi de règles, de modèles et de langage communs, a poursuivi Julien Mercier. Si tous les logiciels font de bons exports IFC, une question demeure : comment je paramètre mon export pour qu’il soit le plus utile possible, au plus grand nombre. » C’est aussi le rôle des chartes et des conventions BIM, sensées fixer les règles du jeu. « Le maître d’ouvrage rédige une Charte BIM qui liste ses objectifs, a confirmé Emilie Tourret. Quant à la maîtrise d’oeuvre, elle répond aux exigences via une convention BIM, qui encadre la méthodologie d’échange entre intervenants. »
Pas d’interopérabilité sans formation
Faiblesses de la formation en France
Former les jeunes générations au maniement de nouveaux logiciels, à la gestion des formats et à l’échange de données, tel est le principal défi à relever, aujourd’hui. Tandis que les filières technologiques et professionnelles auraient pris la mesure de la dimension stratégique du BIM, d’après Emmanuel Di Giacomo, les écoles d’ingénieurs et d’architectes seraient en revanche à la traîne. « Ce n’est pas parce que vous enseignez à des étudiants l’utilisation d’un logiciel qu’ils seront « BIM ready » quand ils arriveront sur le marché », a lancé le responsable d’Autodesk. La formation continue se serait, quant à elle, adaptée aux évolutions en cours. « Les compétences s’acquièrent dans la durée, a fait remarquer Guillaume Vray. Nous proposons ainsi à nos clients un suivi à la carte, pour qu’ils fassent les bons paramétrages, en fonction de leurs projets. »
Les atouts du BIM pour une collectivité territoriale
Faciliter la compréhension du projet par les membres du jury, en phase concours, réduire les problèmes et les délais, en phase chantier, garantir une meilleure appropriation de l’opération par les futurs utilisateurs, offrir une meilleure connaissance de son patrimoine et optimiser l’exploitation de ses équipements, tels sont les atouts du BIM attendus par la Métropole de Toulouse.
Manque d’analyse de la part des acteurs
Comme pour l’acquisition du bon logiciel, les acteurs doivent prendre le temps de questionner leurs besoins avant de se former. « Il ne faut pas faire du BIM parce que le maître d’ouvrage le demande, a souri Julien Mercier, sinon c’est un BIM subi ! Avant de se former, il faut se demander pourquoi je fais du BIM, quels sont mes objectifs et alors seulement acquérir les logiciels et former ses équipes » Au moment de sa prise de poste, Emilie Tourret s’est posée ces questions et s’est inscrite à l’école des Ponts et Chaussée, à Paris, pour y suivre un cursus en formation continue, pour appliquer en parallèle, sur le terrain, ce qu’elle y apprenait. « Quant à mes collaborateurs, raconte la BIM Manageuse, ils montent en compétence au fur-et-à mesure de nos projets. » Qu’en est-il des entreprises locales, se donne-t-elle les moyens de former leurs équipes ? Choisies non pas pour leurs compétences, mais pour leur motivation, celles qui ont travaillé avec Toulouse Métropole jouent globalement le jeu, selon Emilie Tourret, ce qui leur permet de continuer à travailler en BIM, au-delà même des projets de la métropole.
Les éditeurs sont-ils prêts à coopérer ?
Né en 1996, l’IFC a été créé par l’International alliance for interoperability, devenue depuis l’association BuildingSMART international qui se consacre à la définition des grandes lignes de ce format. Les grands éditeurs participent à ces travaux, y compris à leur déclinaison locale, quand il s’agit, par exemple, d’éditer des guides méthodologiques. « On est dans le partage des bonnes pratiques, a assuré Emmanule Di Giacomo. Les éditeurs en tant que membre de l’association financent les efforts d’amélioration de l’interopérabilité, mais on a aussi besoin que les utilisateurs fassent remonter les difficultés qu’ils rencontrent pour ne pas stagner... » « Nous faisons remonter des demandes, a confirmé Emilie Tourret, nous échangeons avec la Fédération Cinov et l’Ordre des architectes pour savoir quels sont les problèmes à régler pour faire progresser les processus de façon globale » Un processus itératif prometteur.
Autour de la table
Devant leur écran d’ordinateur, quatre invités
ont témoigné à distance de leur expérience du
BIM et des moyens d’encourager les acteurs
du bâtiment à se lancer : Emilie Tourret, BIM
Manageuse à la Direction de la construction
des bâtiments publics de Toulouse Métropole ;
Emmanuel Di Giacomo, Responsable Europe
du développement des écosystèmes BIM chez
Autodesk ; Guillaume Vray, Directeur France
de All Plan et Julien Mercier, Dirigeant d’IMPACT,
vice président de la fédération Cinov en charge de
l’innovation et de la prospective et animateur
du groupe de travail BIM & Transition
Numérique.
UNE QUESTION DE LA SALLE
Je fais de la VRD, est-ce que je suis concerné par le BIM ?
Oui, des outils existent sur le marché, c’est d’autant plus
intéressant pour les collectivités locales que le recours au
BIM leur offre une meilleure connaissance de leur réseau
de VRD et des interventions plus efficaces sur le long
terme.