Dans la continuité du premier REX, sur la stratégie
BIM de l’Université Caen Normandie, le deuxième
REX a présenté plus en détail la première application
expérimentale de cette stratégie : la mise en oeuvre
du BIM dans la conception du centre de recherche en
environnement côtier (CREC).
RouenREX
Les outils du BIM mobilisés
L’agence CBA Architecture et le bureau d’études SOGETI Ingénierie bâtiment ont travaillé main dans la main pour mettre en musique la stratégie BIM élaborée par l’Université Caen Normandie. Pour cela, ils ont disposé d’une charte et d’un cahier des charges BIM, précisant les règles de codification et de confidentialité, et les objectifs du maître d’ouvrage, en termes de synthèse et d’exploitation. A partir de ces documents, une convention BIM innovante et inédite de 98 pages a détaillé 16 cas d’usages. Pour faciliter les échanges entre les acteurs du projet, tous ont utilisé la plateforme KROQI et les formats IFC et BCF, en phases conception et chantier.
Contraintes rencontrées et solutions apportées
Le cahier des charges a été jugé trop détaillé et trop dense par la maîtrise d’oeuvre, qui a confié avoir perdu du temps en amont du projet, avec une définition des usages trop poussée. Un constat qui a amené François Caumont, directeur de l’immobilier et de la logistique à l’Université de Caen Normandie, à reconnaitre « qu’il convenait aujourd’hui d’aborder le BIM avec plus de pragmatisme. » Autre contrainte mise en avant par les intervenants, l’organisation trop sophistiquée de l’équipe concernée par le projet, avec un grand nombre d’intervenants (architectes, BIM manager, OPC BIM), sous le regard avisé – et exigeant - de la communauté des chercheurs de l’Université. « Il a fallu veiller au respect des règles de départ, dans un contexte d’interactions difficile, a analysé Christophe Bidaud. Ce qui nous a obligé à manier avec pragmatisme la charte BIM pour être plus efficaces. »
Quels bénéfices au final ?
Les deux intervenants ont vanté la qualité de la maquette qui permet de bien dimensionner les locaux techniques et d’échanger plus facilement avec la maîtrise d’ouvrage. Cependant, ils ont aussi regretté les demandes complémentaires en phase d’avant-projet détaillé (APD) : « On nous a demandé plus de codifications d’objets et de dissocier davantage les maquettes techniques, a donné pour exemple Stéphane Wallet, directeur délégué chez SOGETI Ingénierie bâtiment. Cela prend du temps. » « D’une manière générale, le BIM décloisonne les phases, a remarqué de son côté Christophe Bidaud. On fait presque passer les tuyaux dès l’esquisse ! » Une évolution qui justifierait selon l’architecte de revoir le modèle de rémunération des maîtres d’oeuvre. Car, sur ce projet, si le maître d’ouvrage était tout à fait conscient des enjeux et des coûts du BIM, l’équipe de maîtrise d’oeuvre avait, pour sa part, sous-estimé la part BIM de sa mission. « Avec le BIM, on fait plus d’EXE et de synthèse, ce que nous pensions avoir suffisamment valorisé, mais non, confirme Stéphane Wallet. Grâce à ce surcroit d’EXE et de synthèse, on est plus précis dans le service rendu au maître d’ouvrage, ce qui est précieux, mais il nous faut à l’avenir mieux évaluer ce volet-là. » Au total, le cabinet d’architecte et bureau d’études évaluent respectivement leurs pertes à 170 000 et 100 000 € sur cette opération. « Nous nous sommes aussi aperçus que nous étions à la croisée des chemins, a jugé Christophe Bidaud. En assurant cette prestation BIM, nous avons réalisé à quel point notre métier a changé, avec ce volet gestion de nomenclature des fichiers qui pèse lourd, et la nécessité de s’entourer de nouveaux collaborateurs, avec des profils différents. » Face à ce bilan en demi-teintes, François Caumont, directeur de l’immobilier et de la logistique à l’Université de Caen Normandie s’est justifié : « Notre but n’était pas de faire perdre de l’argent à nos partenaires. Il faut tirer une leçon de cette expérience, pour progresser tous ensemble. »
Les + et les –
du BIM pour ce projet
LES +
+ Synthèse technique plus poussée, adaptée à la multiplicité des réseaux du projet
+ Partage des données via KROQI
+ Maquette propice à un bon dimensionnement des espaces techniques
LES -
- Cahier des charges trop détaillé
- Complexité de l’organisation des personnes impliquées
- Coût du BIM pour la maîtrise d’oeuvre
UNE QUESTION DE LA SALLE
Où placer le curseur entre un cahier des charges trop détaillé et une
feuille de route qui serait au contraire trop peu contraignante ?
Plus que le degré de précision, c’est le timing des demandes de modifications
qui semble avoir posé problème : « Elles nous été transmises trop tardivement,
a regretté Stéphane Wallet, directeur délégué chez SOGETI Ingénierie bâtiment.
Ce qui nous a gêné, c’est que la codification et la dissociation des maquettes
nous ont été demandées quand la maquette était déjà modélisée, ce qui nous a
obligé à faire évoluer les objets un à un. »